
🎎 La délicatesse et l’élégance sont des qualités très appréciées dans les arts traditionnels japonais. Au sommet du raffinement, l’Ikebana (生け花), pratique artistique très répandue au pays du soleil levant.
Contraction en japonais des termes « 生け » (Ikeru) / faire vivre ou vivre, et « 花 » (hana)/ fleurs, l’Ikebana est l’art traditionnel japonais qui consiste à faire des arrangements floraux 💐. Appelé également Kadō (花道, lit. « La voie des fleurs »), il est considéré comme l’un des trois arts classiques du raffinement japonais, avec le Kōdō (香道 , ou « La voie de l’appréciation de l’encens / des parfums » ) et le Chadō (茶道, lit. « La voie du thé ») 🍵.
Cet « art de faire vivre les fleurs », est pratiqué depuis plus de 600 ans dans l’archipel.
Néanmoins ces prémices remontent au VIème siècle avec l’arrivée du Bouddhisme au Japon. En effet, en Inde 🛕 où est né le Bouddhisme, les fleurs ou leurs pétales étaient éparpillées de façon informelle autour de l’autel. Mais c’est précisément les moines bouddhistes chinois qui ont été les premiers à enseigner l’art floral et qui ont introduit des éléments basiques au Japon. A cette époque, Ono no Imoko (小野 妹子), ancien émissaire de l’impératrice Suiko 🎎 (推古天皇, Suiko Tennō, 554-628) auprès de la cour des Sui (dynastie Suí cháo, 隋朝, 581-618), devenu par la suite moine bouddhiste, élu domicile à Rokkaku-dō, un petit temple, bordé d’un étang, dans ce qui allait devenir Kyōto.
N’appréciant guère les arrangements floraux des moines de l’époque ; responsables d’ailleurs de la mise en place des offrandes sur les autels, Ono no Imoko , dans le cadre du rituel bouddhiste 📿, commença à expérimenter et à formuler les règles d’arrangement floral pour le style Rikka ; un style formel orienté verticalement utilisant un vase haut ou haut à col étroit. Dans ses modèles, les fleurs et les branches étaient dirigées vers le haut et disposées par groupes de trois, représentant ainsi la relation entre le ciel, l’homme et la terre.
Il sera à l’origine de la première école d’Ikebana, l’école Ikenobō (池坊) ; « Ike », 池 / étang, et « bō » , 坊 / hutte. D’ailleurs ce nom deviendra associé à ces prêtres responsables de la décoration des autels du temple Rokkaku-dō ; Ono no Imoko, pris le nom de Semu Ikenobo.

L’Ikebana est une pratique séculaire japonaise qui va bien au-delà du simple agencement de fleurs en bouquets et s’apparente même à de la sculpture 🗿. Chaque élément, du contenant aux végétaux, revêt une importance de premier ordre et porte une connotation symbolique marquée. C’est donc un art qui valorise aussi bien le vase, les tiges, les feuilles 🍃 et les branches que la fleur elle-même 🌼.
L’arrangement floral japonais cherche également à créer une harmonie de construction de rythme, de lignes et de couleurs. D’ailleurs, les végétaux sont choisis en fonction du message que l’on veut faire passer ; ainsi par exemple les bambous 🎋 symboliseront la prospérité alors que les fleurs de pêcher 🍑 seront un hymne à la féminité. En Occident nous accentuons souvent la quantité et les couleurs des fleurs, en portant l’attention essentiellement sur leur beauté, les Japonais, quant à eux, accentuent les lignes de leurs arrangements.

En effet, cet art prend en compte de nombreux paramètres, mais trois notions essentielles sont toujours représentées dans la composition : la terre 🌱, le ciel ⛅ et l’humain 🧑, chacune étant symbolisée par un élément disposé selon des codes précis :
- Le ciel ⛅, point culminant de la composition, étant souvent représenté par une forme érigée et bien dressée, par exemple : une branche, ou une hampe florale très rigide.
- L’humain 🧑, en deuxième position, situé au centre ou au milieu du décor, est souvent penché. il peut être représenté par une belle et délicate fleur 🌺 centralisée ou par un feuillage texturé.
- La terre 🌱, est représentée au travers végétaux 🌿 placés au plus bas de la composition, parfois même à l’horizontale.
Trois dimensions doivent également être respectées : la profondeur, l’espace et une certaine asymétrie, toujours bienvenue.
Il faut savoir qu’il existe plusieurs écoles d’Ikebana 🏫 , les plus connues sont :
- L’école Ikenobo : la première école et la plus ancienne, faisant référence à la lignée de moines 📿 de la famille Ikenobo qui perpétue la tradition de l’art floral japonais depuis le VIIe siècle. Parmi ces héritages, le Tatebana, une sculpture florale fondée sur des principes religieux évoquant des notions abstraites telles que l’éternité ou encore la relation entre l’Homme et son environnement.
- L’école Ohara, quant à elle, apparaît au XIXe siècle avec le mouvement Moribana qui propose une version plus moderne de l’Ikebana tout en incluant des fleurs occidentales 🌹.
- Enfin, l’école Sōgestu fondée en 1927, rompt avec les conventions traditionnelles de l’Ikebana en mettant l’accent sur la personnalité de l’artiste.

L’Ikebana va de pair avec la philosophie zen🧘♂️. Plus que l’esthétisme, c’est la recherche de sens et les symboles qui rendent l’art floral japonais si fascinant. Aussi, l’Ikebana est porté par la vénération de la nature émanant de la culture nippone. Les sculptures suivent le cycle des saisons 🌦️ tout en représentant la vie dans sa forme la plus pure, du bourgeon à la feuille morte 🍂.

Cette forme d’expression artistique se rapproche de la méditation dans le sens ou l’artiste doit se concentrer sur ce qu’il ressent au moment présent pour faire appel à sa force créative en lien avec sa propre vérité… Ainsi, en pratiquant régulièrement cet art floral, la personne va aiguiser son sens de l’observation. Véritable connexion entre l’humain 🧑 et la nature 🌱, l’Ikebana saura élever notre conscience de l’univers 🌌 tout en libérant l’énergie créatrice de chacun d’entre nous.